L'essor des sciences de l'information au Québec

Ce dossier traite des sciences de l’information au Québec, de leur évolution croissante et de leur nouvel ancrage dans la profession, la communauté et divers organismes. Depuis les deux dernières décennies, l’arrivée de l’internet, l’évolution exponentielle des technologies de l’information et l’entrée des milleniums, les sciences de l’information ont vécu un véritable séisme bousculant les disciplines traditionnelles telles que la bibliothéconomie et l’archivistique. Les professionnels de l’information au Québec ont emboîté le pas. Des disciplines telles que la gestion de l’information stratégique, la gestion des connaissances, la maitrise des métadonnées, l’exploitation du web sémantique, l’analyse de données et l’intelligence artificielle ont alors été progressivement introduites dans la formation. Parallèlement, les métiers en sciences de l’information au Québec ont connu une transformation significative marquée par l’introduction et l’application de pratiques professionnelles telles que les sciences sociales et le marketing, la gestion de projet ou les interventions spécifiques dans les milieux communautaires.

 

 Alliant mémoire et modernité, l’étonnant écosystème documentaire Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) s’appuie sur les approches de médiation culturelle et éducative innovantes pour élargir ses publics. Dans le sillage des courants actuels, les bibliothécaires et les archivistes ne sont plus seulement des prescripteurs, ils mettent en scène de diverses façons le patrimoine documentaire. Au fil des ans, ils ont déployé des actions de communication et de partage, tant pour nourrir la curiosité du grand public et des familles qu’en soutien au milieu éducatif. Leur posture professionnelle évolue : tout en conservant leurs valeurs fondamentales, ils deviennent créateurs de contenus, passant eux aussi de l’ombre à la lumière.

 

Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) est la plus importante institution culturelle de langue française en Amérique du Nord. Elle fédère trois institutions : la Bibliothèque nationale du Québec, ses Archives nationales, et la Grande Bibliothèque, à la fois bibliothèque centrale des Montréalais et grande bibliothèque publique de tous les Québécois. Chacune d’entre elles est au cœur de riches réseaux ancrés dans leurs racines historiques. Toutes trois entretiennent des liens puissants avec les milieux documentaires, patrimoniaux et culturels du Québec, et contribuent à l’essor des services et de l’offre documentaire, notamment numérique.

Depuis plusieurs années, un besoin grandissant d’accès aux livres numériques se fait sentir dans les écoles québécoises. Le projet Biblius, porté par le ministère de l’Éducation et de l’enseignement supérieur du Québec, permettra, d’ici 2020-21, d’offrir à tous les élèves l’accès à des centaines d’œuvres numériques, via leur bibliothèque scolaire. Un vrai défi, compte tenu des obstacles juridiques, organisationnels, technologiques. Tous les collaborateurs impliqués dans la démarche ont dû innover, afin d’assurer un équilibre entre les besoins du milieu scolaire et les impératifs de la chaîne du livre. Voici la petite histoire de ce grand projet.

Les plateformes et les logiciels libres sont d’un apport précieux pour l’édition scientifique. Cet article présente un retour d’expérience sur l’usage d’un dépôt institutionnel de textes dans le cadre d’un partenariat international de recherche sur l’histoire et l’esthétique du cinéma visant à créer une encyclopédie raisonnée des techniques en ligne (Québec, France et Suisse). Plus justement, il s’agit de réfléchir à l’articulation entre une bibliographie collaborative (Zotero), un dépôt (Papyrus étant la solution proposée par l’Université de Montréal) et l’interface publique d’une Encyclopédie (CMS Omeka S) dans un environnement libre et ouvert. À la clé : une meilleure accessibilité aux publications des chercheurs en sciences humaines et sociales.

Savoir rédiger et publier un article, préparer une conférence, présenter ses travaux… : ces compétences sont devenues essentielles pour les métiers scientifiques. Or les étudiants des cycles supérieurs éprouvent des difficultés à bien communiquer et se sentent souvent isolés. Pour les aider, quatre professeurs de l’École de technologie supérieure de Montréal, ont lancé en 2013 un Service d’aide à la rédaction d’articles (SARA). Dans cette communauté d’apprentissage, aujourd’hui prise en charge par la Bibliothèque, étudiants, chercheurs et experts, s’entraident, en partageant ressources, activités et expériences.

 

Depuis 2017, les bibliothécaires de l’Université du Québec à Montréal ont lancé un vaste chantier de travail visant à actualiser et élargir la composante pédagogique de leur travail à la lumière de l’évolution de l’écosystème socionumérique de l’information d’aujourd’hui. Ce repositionnement majeur a ceci de singulier qu’il suppose un décentrement par rapport à la bibliothèque afin de considérer l’environnement plus général dans lequel elle s’insère. Les bibliothécaires se trouvent ainsi à saisir l’opportunité qu’offre l’importance désormais centrale de former à la littératie numérique dans le système d’éducation contemporain, et ce, en cherchant à favoriser l’appropriation des usages savants et populaires de la culture numérique.

 

Les professionnels de l’information devraient jouer un rôle de premier plan dans la gouvernance de l’information. Pour ce faire, ils doivent acquérir et mobiliser des compétences de nature transversale et stratégique, leur permettant d’analyser les jeux de pouvoir et d’influence entre les acteurs organisationnels. Ces compétences, aujourd’hui essentielles, doivent être prises en considération dans les programmes universitaires de formation en gestion de l’information au Québec.

Comment faire face aux changements apportés par la transformation numérique des organisations et des entreprises ? L’avenir des professionnels de l’information passe par la gestion de l’information mais plus encore, par sa gouvernance. Multidisciplinaire et proactive, cette gouvernance de l’information demande aux experts de la gestion documentaire d’ouvrir leur horizon, de prendre le leadership pour conduire les entreprises et les organisations vers davantage de conformité et de performance. Au Québec, la notion et la pratique de cette gouvernance sont fortement influencées par l’association d’experts et de professionnels ARMA International, qui en a défini le cadre, les principes et la méthodologie.

L’accélération exponentielle de l’innovation technologique, la croissance et l’évolution des marchés, ainsi que les mutations dans les comportements de consommation, induisent des changements importants dans les modèles d’opération et les systèmes de gestion des entreprises. La transition énergétique est une des conséquences de ces transformations. C’est dans ce contexte que le Centre de recherche d’Hydro-Québec (CRHQ) a missionné son équipe Gestion de l’information : il s’agissait de mettre en place un dispositif de veille active, capable d’assurer une surveillance constante de l’environnement informationnel, en détectant les signes indicateurs de changements importants. Cet article retrace le cheminement de l’équipe pour concevoir et implanter un modèle optimal de veille, agrégé à partir de plusieurs modèles existants, puis adapté et personnalisé, afin de répondre adéquatement aux besoins informationnels et stratégiques spécifiques du CRHQ. 

Voici une expérience aussi exemplaire que fructueuse. Depuis 1998, le consortium interuniversitaire canadien Érudit (erudit.org) soutient et valorise près de 200 revues de Sciences humaines et sociales (SHS). Vingt ans plus tard, en 2018, Érudit, devenu une véritable infrastructure de recherche au service de la science ouverte, a établi un partenariat avec le consortium français Couperin pour favoriser le libre accès. Corédigé par Érudit et Couperin, cet article présente le modèle partenarial et le chemin parcouru pour le déployer en France, ses impacts positifs (économiques notamment) et les défis à venir pour assurer sa pérennité.

Encore peu développée il y a vingt ans, la veille connaît aujourd’hui au Québec un succès grandissant dans le secteur de la santé et des services sociaux. Au sein de la Communauté de pratique de veille en santé et services sociaux du Québec (CdPveille3S), des veilleurs passionnés, mus par un intérêt commun, partagent et coconstruisent les pratiques professionnelles de demain. Veille informationnelle, scientifique, stratégique, médiatique : autant d’activités qui répondent à des besoins spécifiques de ce domaine et nécessitent de solides compétences. L’article présente la CdPveille3S : son origine, sa mission, ses membres, ses principales réalisations, ses forces et ses défis.

Comment s’adapter à une clientèle croissante, évolutive et de plus en plus participative ? Mahée Lacourse et Olivier Robert, bibliothécaires à l’Institut national de la santé publique du Québec (INSPQ), nous présentent le formidable réseau de centres de documentation Santécom. À la clé, la mutualisation des ressources et la co-construction de la veille scientifique avec les usagers. Par son succès et son rayonnement, cette expérience novatrice ouvre des perspectives, à la fois de valorisation au sein de la profession, et de collaboration, notamment avec nos cousins français.

 

Doctorante à l’université de Montréal, Elsa Drevon termine une thèse sur la veille stratégique dans le secteur public de la santé au Québec. Tour à tour bibliothécaire de santé, chargée de cours et consultante en veille stratégique, elle présente ici ses travaux de recherche, analyse les différentes formations et les spécificités de la veille au Québec, et plaide pour la bienveillance.

 

L’exploitation des informations administratives relatives aux citoyens tend à générer des problèmes liés à la protection des données. Avec l’instauration en 2018 du Règlement général sur la protection des données (RGPD), les droits des administrés et la protection de leur vie privée se trouvent au centre des processus de mise en œuvre des Systèmes d’Information administratifs. S’appuyant sur une analyse de l’expérience utilisateur sur deux plateformes nationales, ameli.fr et caf.fr, notre article dresse un panorama des changements induits dans les services publics en ligne par le RGPD. Tout en essayant de mettre en relief les éléments constitutifs du RGPD, nous avons dégagé les principaux freins fonctionnels, humains et technologiques au regard du référentiel de mise en conformité à ce règlement.